2 cas cliniques autour de freins restrictifs buccaux

2 cas cliniques autour de freins restrictifs buccaux. Un avec un frein restrictif postérieur et l'autre avec un frein restrictif antérieur

Table des matières

Les mises en garde pullulent concernant la détection de freins restrictifs buccaux. La notion de détection est souvent associée à l’acte de frénectomie, qu’en est il réellement ?

LE FREIN RESTRICTIF LE CHOIX ÉCLAIRÉ DES PARENTS

Le communiqué de l’Académie de Médecine et son appel à la vigilance autour des freins restrictifs buccaux ont permis l’ouverture de débats.
J’aimerai rapeller qu’une détection de frein restrictif buccaux n’aboutit pas fatalement à la frénectomie, que la prise en charge se doit d’être pluridisciplinaire, en respectant le champ de competences de chacun. Le choix de la frénectomie ou non, revient aux parents suite aux différents avis éclairés qu’ils auront eu par les différents praticiens rencontrés.

FREINS RESTRICTIFS, LA PRISE EN CHARGE

Je vous expose ici 2 cas cliniques en toute transparence (avec l’autorisation des parents) qui sont deux exemples typiques. Ceci dans le but de montrer que chaque cas est unique et demande une prise en charge appropriée et individuelle. Qu’il n’y a pas une solution unique en fonction du type de frein et du degré de restriction évalué par plusieurs praticiens (ayant donc une prise en charge complémentaire).

Ces 2 cas cliniques mis en parallèle sont intéressants car ils montrent qu’un frein postérieur n’est pas MOINS restrictif qu’un frein anterieur; et qu’un frein ANTERIEUR n’amène pas fatalement à une frenectomie.

Ce parallèle est intéressant car les praticiens décriant la prise en charge des freins restrictifs buccaux l’associent souvent à l’acte de frénectomie. Pourtant ce n’est pas systématique.

Malheureusement le discours est souvent orienté de façon à dire qu’un frein postérieur n’existe pas ou ne peut pas être restrictif ou qu’un frein anterieur nécessite d’être coupé rapidement.

Ainsi la mesure est de rigueur, et la prise en charge au cas par cas essentielle pour éviter les dérives d’un côté comme de l’autre.

NB:
Ces 2 prises en charge ont été réalisées par visioconférence. Que ce soit en présentiel ou en visioconférence la démarche autour des problématiques d’allaitement ne doit, à mon sens, ne pas être interventionniste, ni pour la mère, ni pour l’enfant. L’évaluation de la tétée se fait toujours en dehors de la séance et me permet une totale mise en confiance de la mère (son environnement, son/sa partenaire filme, la mère est sereine) ainsi la tétée et son évaluation ne sont pas biaisées par un stress externe. Ces demandes spnt couplées à des demandes multiples de vidéos et de discussions en pluridisciplinaire (chiropracteurs pour les 2 cas)

NB²: l’anamnèse complète n’a pas été citée, seule la problématique autour des freins buccaux et de l’allaitement à été évoquée dans ces 2 cas cliniques. Notons que l’impact d’une restriction linguale/labiale peut aller au delà de l’allaitement. Dans ce cas précis il s’agit d’aborder les problématiques principales.

CAS CLINIQUE 1

Frein postérieur et prise en charge pour suivi en allaitement.

Le bébé est né le 14/12/2021, il a 2 mois lorsque je le vois. La mère utilise des bouts de seins (BDS), la douleur lors des tétées est intense. Le bébé semble avoir un RGO de grade moyen à élevé. L’évaluation de la tétée montre une ouverture de bouche restreinte et un allaitement quasi impossible sans BDS engendré par douleur de la succion. La courbe de poids affiche un fléchissement évident.

Suite à une évaluation en pluridisciplinaire avec sa chiropractienne, nous voyons (entre autre) une mobilité linguale difficile du côté latéral, une élévation difficile et un frein sous muqueux potentiellement restrictif. Des massages intra-buccaux sont proposés et fait par la mère. Le bébé est aussi dirigé rapidement vers une orthophoniste.

Des propositions autour des positions sont amenées pour permettre à la mère de trouver celles avec lesquelles elle se sent le plus à l’aise. Il n’y a eu aucune amélioration au niveau des douleurs.
En 1ère intention des massages sur le sein sont proposés ainsi que lapplicaton du chaud sur le sein, en vu d’accélérer le reflexe d’éjection. Le sein est compressé aussi durant la tétée.

Il n’a pas eu de changement significatifs ni au niveau de la douleur, ni au niveau de la prise de poids. En 2ème intention, la proposition est faite à la mère de tirer son lait après chaque tétée afin d’amplifier la lactation et ainsi faciliter l’extraction de lait par le bébé. La mise en place est difficile et la mère, fatiguée de la prise en charge, de voir son bébé souffrir, commence à remettre ses capacités d’allaitement en cause. La mère est invitée à tirer son lait de façon régulière (en dehors des tétées), à raison de 1 à 2 fois par jour, et à alterner avec des mini boost au tire lait afin de s’adapter à sa journée. La mère est épuisée et pense au sevrage. Un allaitement mixte est discuté. La douleur commence à se faire sentir avec les BDS également.

NB: La douleur de la mère restreint potentiellement la libération d’ocytocine qui ihnibe le réflexe d’éjection et amène potentiellement le bébé à compenser avec une pression intrabuccale plus forte.

La mère consulte un ethiopathe.

En parallèle, dès la 1ere séance, la mise en place d’un journal alimentaire a été fait durant 3 semaines, le risque allergique semble inexistant et il n’y a pas de terrain allergique familial. Cette mise en place n’a pas été retardée du fait de l’importance d’identifier la/les cause(s) du RGO et descendre rapidement le grade de ce RGO. La mère choisie l’option naturopathie malgré les propositions d’identification pour une éventuelle œsophagite par un médecin et mise en place d’un traitement adapté (hors IPP).

Le choix du lait artificiel par la mère s’est porté sur une PCN de chèvre afin de limiter le caractère pro- inflammatoire du lait de vache avec un RGO toujours existant. Cependant le RGO est passé d’un grade moyen / élevé, à faible.

L’allaitement mixte a été fait sur 1 semaine, la mère a stoppé d’elle même, retrouvant ainsi confiance en ses capacités à allaiter.

Après plus de 2 mois de massages intra-buccaux, la mère a été invité à voir une dentiste spécialisée en frénectomie pour un avis, les parents ont choisi la frénectomie après tous les avis éclairés des praticiens.

La frénectomie s’effectue le 25/04/22 et le changement de la succion sans BDS est immédiat, la douleur quasi-inexistante. Puis le degré de douleur remonte un peu et de façon cyclique en fonction de l’état global du bébé durant la période de cicatrisation, et l’état émotionnel de la mère.

La courbe de poids remonte de façon spectaculaire, en allaitement exclusif, sans complément à la PCN de chèvre. Le bébé prends 450g en 2 semaines.

La mère explique entendre son bébé déglutir très fortement, sent ses seins parfaitement drainés et dit “re-découvrir l’allaitement”. Le bébé fait quelques nuits complètes, une potentielle amélioration de la respiration nasale est évoquée. Il faut réajuster l’allaitement quelques jours en post frénectomie. Car les seins étant bien drainés, la lactation est amplifié et le bébé peu habitué à cette succion sans BDS, avec une langue libérée de ses tensions, s’étouffe au sein tant le flux est abondant. Cette nouvelle variable lactation abondante /nouvelle succion de bébé, est vite maîtrisée grâce à quelques astuces et du temps.

on observe le diamant sous la langue après une frénectomie au laser.

La cicatrisation n’est pas encore finie, les massages intra-buccaux sont plus délicats à effectuer du fait de la gêne occasionnée par la fibrine, qui a vite disparu (sous quinzaine). Le bébé repousse les doigts de la mère assez fortement, la constat est le même pour la dentiste d’après la mère.

Le travail orthophonique myo-fonctionnel est poursuivi pour rééducation de la langue, ainsi que le travail chiropractique.

En tout, cette prise en charge autour du frein restrictif aura duré 3 mois et demi.

Les parents et ce bébé auront vu une conseillère en allaitement (moi même, qui ai travaillé aussi sur ce cas clinique en pluridisciplinaire en sollicitant une collègue IBCLC, une autre conseillère – les 2 formées freins buccaux, et une chiropracteur de mon réseau). Puis les parents auront vu une ethiopathe, une chiropracteur en présentiel.
Puis les parents auront vu une consultante IBCLC du centre pluridisciplinaire où la dentiste travaille et une autre chiropracteur du centre également. Les parents décideront de poursuivre avec les praticiens qui l’ont suivi depuis le début (moi même et la chiropracticienne initiale).

Le suivi se poursuit. Le grade de douleur évalué lors des tétées est cyclique, mais semble suivre une courbe linéaire vers l’amélioration.

Après 1 mois le grade de douleur est quasi inexistant et la mère découvre un allaitement serein et apaisé.

Il aura fallu un soutien émotionnel autour de l’allaitement quasi quotiden en pré et post frénectomie, une réelle écoute ainsi que des solutions proposées pour pallier aux difficultés, que la mère était libre d’utiliser à sa convenance. ( BDS, allaitement mixte, accompagnement vers un désir de sevrage). Au final ce soutien s’est avéré essentiel à la poursuite d’un allaitement exclusif.

Aujourd’hui le bébé à 9 mois et est toujours allaité.

CAS CLINIQUE 2

Frein anterieur et prise en charge allaitement au 3ème trimestre de grossesse.

O

Le bébé est né le 5 Janvier 2022 . Malgré une prise en charge avant accouchement, la mère sort de la maternité avec des compléments de PCN pour cause de prise de poids trop lente (selon les protocoles).

En 1 semaine et un travail de remise en confiance sur la capacité à allaiter de la mère, l’allaitement continu de façon exclusive, sans compléments. Les signes cliniques sont tous bons.

Pas de douleur lors de la mise au sein.

Le 17 janvier, la mère rencontre le chiropracteur qui évalue un frein restrictif après une évaluation intrabuccale et qui confirme ma suspicion de problème de mobilité de la langue. Le chiropracteur aborde le sujet de la frénectomie éventuelle auprès des parents, le type de frein laissant penser à de réelles difficulté à venir.

Parallèlement, la mère rencontre des problèmes récurrents d’engorgement, mais pas systématiques.

Les massages intra-buccaux pour assouplir la zone autour du frenelum sont commencés très consciencement par la mère. Tant en journée que durant le sommeil du bébé avec massage sous le menton pour favoriser l’élévation de la langue. Mise en place du tummy time et jeu de la balle à trou pour favoriser la protrusion.

L’allaitement est toujours aussi instinctif, pas de problème particulier et après 3 mois et demi de prise en charge par massages, la courbe de poids est ascendante, avec un léger fléchissement visible lors de la stabilisation hormonale présumée de la mère.

Le bébé a un sommeil sans encombre depuis la naissance, malgré l’acquisition des différentes phases de sommeil c’est un bébé qui se réveille en moyenne 4/5 fois, ce qui est une moyenne considéré dans la norme pour l’âge du bébé (4 mois et demi).

Lors du sommeil, la langue est plaquée au palais et le bébé dort la bouche fermé, ce qui laisse penser à une respiration nasale efficace.

Les engorgements deviennent rares.

J’expose le cas à deux collègues professionnelles de l’allaitement, formée en freins buccaux également. Afin d’être sûre que mon analyse de la situation est globale et complète. Le chiropracteur et moi même sommes en désaccords sur le futur de la prise en charge de ce frein.

Après la prise de renseignements sur les bénéfices/risques de la frénectomie auprès du chiropracteur et moi-même, la décision des parents est prise en défaveur de la frénectomie.

Les massages sont suspendus avec l’arrivée des 1ère poussées dentaires. Et la décision bilatérale est prise de cesser les massages afin de ne pas créer d’éventuels trouble de l’oralité.

Plus d’engorgement.

Je propose un accompagnement avec un orthophoniste ou ergothérapeute afin de travailler la mobilité de la langue en anticipation de la diversification et de l’acquisition du langage. Une proposition de DME est amenée afin de poursuivre le travail de la langue et de la sphère maxillo-faciale en plus de la succion au sein.

Je propose de voir un thérapeute manuel régulièrement afin de s’assurer que les tensions ne reviennent pas.

La proposition de faire un point régulier est proposé, et les parents sont informé que la fenêtre pour une frenectomie et un travail de cicatrisation efficace risque de se terminer. Que s’il y a des problèmes éventuels il faudra recontroler quand l’enfant sera disposé à comprendre et reproduire une consigne (3/4 ans).

Il est difficile d’évaluer un risque ou un non risque pour l’avenir de l’enfant, et adulte en devenir, avec un frein jugé restrictif.

Dans ce cas ci, les parents étaient très disposés à effectuer les consignes proposés pour la prise en charge de ce frein. Le suivi avec une ergothérapeute permet d’accompagner l’enfant dans toutes étapes transitionnelles de son apprentissage (mastication, acquisition du langage).

Lors de la reprise de travail, la mise en place d’un contenant à été longue à amener. Mais à ce jour, le bébé arrive à boire 120ml à la babycup sans difficultés.

CONCLUSION

Nous voyons à quel point la prise en charge en pluridisciplinaire est essentielle et nécessaire. Et que la frénectomie ne doit pas être faite en fonction du type de frein rencontré.

En tant que professionnel et malgré les formations complémentaires autour des freins buccaux, il est important d’œuvrer chacun dans nos champs de compétences. Et ainsi prendre en compte le caractère unique de chaque dyade, chaque famille, qu’il y ai allaitement ou pas.

Marina Boudey conseillère en allaitement en Ardèche ou en visioconférence quel que soit votre lieu de vie.

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Marina Boudey
Lact'essence

Je suis Marina Boudey, j’ai créé Lact’essence en 2021. Je suis maman d’un petit Milo né en 2019, encore allaité aujourd’hui.

Notre parcours d’allaitement n’a pas été simple : né par césarienne programmée, des difficultés sont apparues dès le début.

Des freins restrictifs identifiés assez tardivement, de nombreux doutes, peu d’accompagnement et beaucoup de culpabilité m’ont amenée à me former pour devenir conseillère en allaitement.

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